Nos ancêtres les Gaulois… Ile Saint-Louis, Paris
Arrivée fulgurante. Après avoir réservé en bonne et due forme, nous patientons dans l’entrée. On nous demande très pertinemment ce que nous venons fêter… Question louche… qui aurait du nous mettre la puce à l’oreille…Nous sommes un groupe de 7. Les quatre plus chanceux d’entre nous ont la chance d’attendre à l’intérieur alors que les autres sont bloqués dehors par un-cerbère-à-queue_de cheval_du meilleur-gout-qui-se-la-joue-physio. Nouveau signe douteux. Mais nous sommes une bande un brin maso, nous décidons de poursuivre l’aventure.
Aussi, nous réjouissons-nous de repoireauter à l’intérieur en découvrant les lieux : voûte obscure, longues tablées grivoises, buffets suspects…Nous venons de pénétrer dans une dimension, où le temps n’a plus d’importance.Après tout, les Gaulois passaient des heures à ripailler !
Nous prenons place. Un serveur passe et nous demande en aboyant ( en langue gauloise assurément) si nous connaissons la maison. Nous haussons les épaules...
« Euh pas vraiment »
Pas grave… Formule à 35 euros, entrée, plat, fromage et dessert ! Pour débuter, c’est buffet à volonté… Youpi ! Nous sommes une bande de petits veinards qui va s’en mettre plein la panse…il a l’air d’insinuer… Buffet à volonté !!!! Quelle bonne affaire nous allons faire ! En plus, nous sommes vernis, le vin également coule à flots du tonneau !
Le serveur nous balance ensuite les couverts sur la table et nous plante sous le nez un panier dégoulinant de légumes, petit détail décoratif, qui aurait pu avoir son charme, mais hélas qui fait office de première partie du magnifique buffet auquel nous avons droit, les crudités !Pour le reste, il nous indique, une table où croupissent des rillettes de saindoux, du saucisson discount cartilagineux, son homologue chorizo au colorant rouge et des salades de carottes, piémontaises et taboulés industrielles sorties de leurs barquettes depuis des siècles et tassées dans des pots luisants.
Nous ne nous laissons pas abattre. C’est idiot mais nous avons malgré tout envie de croire que nous ne sommes pas en train de nous faire pigeonner comme des cons.Poliment, nous remplissons nos assiettes et nos verres d’une infâme piquette, capable de ruiner une vinaigrette. Pendant la dégustation, un barde, qui aurait pu être le digne fils de Candy et du nain Prof, vient pousser la chansonnette en entonnant le pire de la sous-culture festive française. Il s’agit d’un grand artiste, qui de sa longue carrière n’a jamais percé dans la musique, s’est contenté de percer les tympans d’infortunés passants. Ainsi, sur des hymnes aussi savoureux que « chevaliers de la table ronde » ou « bonne anniversaire Dédé », nous nous retrouvons à déglutir ce que la charcuterie a fait de pire au monde, une charcuterie qui malgré la faiblesse de l’éclairage parvient à reluire et suinter…
Nous laissons le panier de légumes de côté. Les carottes sont velues, les tomates sont éclatées, et possèdent les marques de malaxages intensifs de doigts inconnus, qui auront sans doute accroché les barres dans le métro ou se seront curé le nez, les radis sont surnuméraires ( la maison aura sans doute trouvé un lot de cagettes abandonnées sur une place de marché)…
Le barde continue son show. Fins stratèges que nous sommes, nous comprenons que si nous cessons de le regarder, il va s’arrêter. Et ô miracle, cela fonctionne. Le barde gratte une dernière fois sa guitare de son ongle d’un jaune intéressant et passe à chaque table pour faire la quête… et oui, le rat-quête.
Passe encore un cortège de minutes. Nous ne savons plus très bien. Le serveur tarde à venir prendre la suite de la commande, peu importe car sous les effets psychédéliques de la piquette, nous décidons de prendre quelques petites photos fallacieuses ( bientôt visibles sur ce blog) Nous nous mettons en scène avec nos amis les légumes. Après tout, chez les gaulois également, quand on se faisait suer à table, on jouait sûrement avec la bouffe.
Arrive enfin l’instant magique et incroyable de la commande du plat principal. Nous nous frottons les yeux. Ne sommes nous pas en train de rêver ? Non ! Le serveur est enfin là ! Et assurément, c’est bien lui et non un mirage, il nous aboie dessus et s’impatiente ! Hip hip houra ! Nous optons pour des brochettes et des entrecôtes, miam !Miraculeusement, ce plat principal arrive rapidement, grâce à l’hyper productivité du cuistot intérimaire qui enchaîne la barbaque sur son grill plus vite que Zorro ne signe son Z.Curieusement, nos morceaux de carnes arrivent bien seuls et dénudés sur leurs assiettes. Les brochettes ont des allures de cure-dents sur lesquels on aurait empalé des crottes de moutons alors que nos entrecôtes ressemblent à des semelles pour nourrissons.Nous zieutons les alentours. Un cortège de frites va assurément se radiner avec tout son lot de sauces ! Mais non, notre aimable serveur, nous abandonne un plat un inox de la taille d’une soucoupe sur un coin de la table, plat en inox où gisent, pour les 7 épicuriens que nous sommes, une poignée de haricots verts « Chaville », une louche de riz et une bouse de ratatouille. Un peu démunis, nous parvenons à quémander une seconde portion, en gémissant. Nous l’obtenons in extremis. Le serveur sourcille. Des clients comme nous, ce sont des clients qui vous feraient couler la baraque !
Le temps n’a toujours plus d’importance. Nous nous nourrissons de piquette. Le fromage se pointe. Chouette ! Nous pensons, le fromage, c’est toujours bon ! Le plateau, qu’on nous présente est surprenant. Il contient une variété peu répandue de camembert, le chevelu…notre camembert est brun ! Nous le prenons en photo et nous gardons bien de le goûter. Nous ne sommes pas très portés sur le capillaire dans le domaine culinaire.Le temps passe, trépasse toujours. Nous nous ennuyons un peu car nous avons terminé de saborder tout ce qui était déposé sur notre table. Nous avons fourré le pain de moutarde, au cas une personne mal avisée déciderait de le resservir. Nous avons assaisonné notre panier pour achever les légumes qui y étouffaient…
Vient le temps des desserts. Nous ne sommes pas encore résignés. Notre adorable serveur nous dépose un plateau, que nous n’avons pas commandé et se sauve sans rien entendre tel Bernardo ( celui de Zorro…qui fait semblant d’être sourd). Nous avons beau le héler, monsieur préfère faire sa mauvaise tête. C’est vrai, sont chiants ces touristes qui ne veulent pas béqueter ce qu’on leur jette ! Nous finissons par nous lever et lui rapporter son dû. Il semble étonné. Le ton monte. Les esprits s’échauffent. Fallait pas espérer que la piquette, dont on nous a abreuvé, allait adoucir les esprits des Gaulois que nous sommes ! Un responsable se pointe à notre table. Légère explication. Rien de concluant. Nous obtenons néanmoins le droit de commander, de choisir nos desserts ! Et cela sans avocats ni recours à la loi ni même Julien Courbet !
Notre délicieux serveur nous les apporte radieux et dans son œil malin, on ne distingue aucune lueur vengeresse ou haineuse à notre encontre. Il est bien intentionné et fait preuve d’une conscience professionnelle à toute épreuve !L’heure de l’addition enfin ! Sommes prêts à payer pour être relâchés ! Nous versons donc la rançon, en ne manquant pas de taquiner notre ami serveur qui a un sens de la repartie détonnant. L’un de ses acolytes, qui affectionne sans doute les combats de pitbulls se pointe et nous sert un très pertinent laïus sur la difficulté d’être serveur...
Bilan, ils ont bon dos nos ancêtres les Gaulois, car grâce à eux, on peut
- réduire le personnel au minimum grâce à un système de buffets
- faire bosser le client, qui met son couvert, prépare ses crudités, lave les légumes ( étape vitale sinon Tourista assurée), les épluche ( sauf si le client est un lapin)…
- renâcler sur les conditions d’hygiène… buffets à proximité des toilettes, pénuries de papier WC ( ils ne s’en servaient pas nos ancêtres les Gaulois ?), couverts dégoûtants, tables collantes, sols douteux
- radiner sur les cendriers…( quand on en demande un au serveur, il vous conseille d’écraser votre mégot par terre… véridique… ! Même moi, je ne crois pas que je suis en train d’écrire cela !)
- servir de la merde… c’est vrai, après tout, ils n’étaient pas très éduqués nos ancêtres les Gaulois..